Retour d’expérience sur l’essai inter-laboratoire Norman de 2019 couplant l’échantillonnage passif à l’analyse non ciblée

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2023

Afin de caractériser de manière optimale la contamination du milieu aquatique, il faut réunir à la fois une stratégie d’échantillonnage et une approche analytique permettant la détection des contaminants la plus large possible. Des prélèvements ponctuels ne permettent qu’un état des lieux à un moment précis, mais le choix d’un échantillonnage passif reposant sur l’adsorption des micropolluants par un support déterminé permet d’estimer la contamination moyenne durant la période d’exposition du support. Après désorption des contaminants, leur détection est généralement assurée par chromatographie couplée à la spectrométrie de masse. L’approche traditionnelle ciblée n’autorise que la détection de contaminants présélectionnés. Pour détecter le plus grand nombre de contaminant possible il faut alors recourir à une approche non-ciblée basée sur la spectrométrie de masse à haute résolution (HRMS). Cependant, le couplage de l’échantillonnage passif et de l’analyse HRMS n’est pas une approche commune et un essai inter-laboratoire (EIL) a donc été organisé et réalisé en 2019 dans le cadre du réseau Norman. Dans le cadre de cet EIL, 21 laboratoires devaient utiliser une méthode LC-HRMS prédéfinie pour analyser les mêmes extraits de POCIS exposés pendant 24 et 48 heures en entrée et en sortie d’une usine de potabilisation d’eau.

Ce rapport présente donc un premier retour d’expérience sur les résultats de cet EIL en examinant plus particulièrement les performances des laboratoires pour la recherche de molécules spécifiques dopées dans les échantillons, les logiciels libres pour le traitement des données HRMS, la comparabilité des empreintes chimiques générées par les différents laboratoires, puis l’effet de la durée d’exposition de l’échantillonneur passif sur la nature des contaminants détectés.
En premier lieu, on remarque que la méthode analytique imposée par les organisateurs de l’EIL n’a pas été rigoureusement suivie par les 21 laboratoires participants. Les variations observées peuvent concerner le volume injecté sur la colonne tout comme le gradient chromatographique (composition, débit). Une telle disparité des conditions analytiques crée une première source de difficulté pour la comparaison des résultats des différents laboratoires. Néanmoins, lorsque l’on ne considère plus un ensemble de molécules inconnues (caractérisé par une masse et un temps de rétention) mais des molécules connues (caractérisée par une masse, des fragments et éventuellement un temps de rétention), la comparaison reste tout à fait possible. On observe alors que les 6 molécules dopées dans les échantillons sont effectivement bien détectées par les différents laboratoires avec une fréquence de détection comprise entre 90 et 95%.
De plus on remarque que l’erreur sur la masse est généralement comprise entre 0 et 3 ppm, conformément au niveau de tolérance préconisée dans la littérature pour l’identification d’un composé lors d’une analyse par HRMS. Cependant, on remarque que, pour certains cas plus minoritaires, la déviation en masse peut atteindre 10 ppm. Une analyse suspectée avec une tolérance usuelle de 5 ppm aboutirait alors à un certain nombre de « faux négatifs » tandis qu’adapter la tolérance à 10 ppm aboutirait à augmenter le nombre de « faux positifs ».
Ensuite, afin d’examiner les données HRMS avec une approche totalement non-ciblée, ce rapport compare deux logiciels en accès libre : MZmine et workflow4metabolomics (W4M). D’une manière générale, MZmine révèle un plus grand nombre de « features » (signal associée à une molécule) que W4M. Cependant, cela n’est vraisemblablement pas lié à la performance du logiciel mais à la différence des critères utilisés pour le « peak picking » (recherche automatisée des signaux).

En raison des différences dans les méthodes d’acquisition évoquées auparavant, la comparaison directe des empreintes chimiques générées par les laboratoires participants s’est avérée très complexe et nous conduit à des différences. Néanmoins il en ressort une observation assez inattendue sur la durée d’exposition des échantillonneurs passifs. En effet, sur l’ensemble des composés détectés, environ un tiers est détecté uniquement dans les échantillonneurs exposés 2 jours à l’eau de rivière, un tiers est détecté uniquement dans les échantillonneurs exposés 4 jours, et un tiers est détectés dans les deux échantillonneurs. Un examen plus détaillé des « features » suggère qu’une augmentation du temps d’exposition des échantillonneurs favoriserait la détection des composés de masse plus importante et plus lipophiles.

 

Auteur(s): 
Merel S., Ducrocq T., Miège C.
Nom de l'institut: 
INRAE
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